D’origine franco-cambodgienne, Helen Sea Ung, 38 ans, a connu le racisme anti-asiatique dans la région de Bordeaux où elle vivait, et quand son copain de l’époque était venu travailler à La Réunion, elle l’a suivi sans vraiment connaître où elle débarquait.
«Au départ on devait venir pour deux ans, et je me suis vite sentie bien ici. L’accueil, la mentalité, le métissage, tout m’a plu, j’ai été vite adoptée par les Réunionnais, ma relation sentimentale s’est terminée, je suis restée sans aucun regret» dit-elle.
Pendant 5 ans, Helen va enseigner l’anglais dans une école primaire et être surveillante dans un collège. Parallèlement, elle a aussi réalisé plusieurs shootings photos, et c’est ainsi qu’un article lui avait été consacré à l’époque, avec couverture d’un magazine, réalisé par votre serviteur…
«J’ai passé le concours Education Nationale pour être titularisée mais j’ai eu une crise d’angoisse. En réalité, j’avais toujours rêvé d’être artiste à mon compte, de pouvoir m’exprimer et faire passer des messages de bienveillance. Je n’étais pas faite pour l’enseignement, et comme j’avais toujours aimé dessiné, je me suis consacrée à ma passion, je me suis lancée dans la peinture, et les critiques sur les réseaux sociaux ont été très positives». Helen a donc vendu des toiles, elle a même fait une expo avec le célèbre artiste-peintre Charly Lesquelin…
Un salon de tatouage à Saint-Pierre
Et puis son destin professionnel a basculé: «En 2018, un ami a ouvert un salon de tatouage, j’avais déjà moi-même trois tatouages, il m’a proposé de m’initier et c’est ainsi que j’ai appris mon nouveau métier» confie Helen. Sept mois plus tard, elle ouvrait son salon à Saint-Pierre, et depuis, elle a été très sollicitée.
«J’ai eu une grosse demande, majoritairement une clientèle féminine 30/40 ans, la crise Covid n’a pas impacté ce secteur… » dit celle qui propose à ses clientes des tatouages «style girly, floral, ornemental. La cliente m’explique son histoire, ses envies, j’imagine le dessin, et elle le découvre le jour même, question de confiance mutuelle. Chaque création est unique, le tatouage doit être porté comme un bijou» explique notre belle tatoueuse qui compte plus de 13 000 fans sur Insta, autant sur Facebook et 3 000 sur TikTok.
Helen nous confie que ses tatouages d'inspiration asiatique et bouddhiste représentent des valeurs auxquelles elle tient, "amour, force, bienveillance"... Le dernier tatouage qu'elle a fait faire sur son corps la semaine dernière, est un papillon jaune de La Réunion, symbole donc de son attachement à notre île...
L’Amour via Tinder et maintenant le départ…
Alors pourquoi ce départ de La Réunion? «En fait, depuis la crise Covid, je pensais à partir à l’étranger pour me perfectionner, pour de nouveaux challenges». Mais il fallait sans doute un déclic, et ce fameux déclic est arrivé en la personne d’un beau gendarme mobile prénommé Geoffrey.
«Notre premier contact s’est effectué sur Tinder, il est venu à La Réunion en mission, je lui ai fait découvrir l’île, et depuis nous vivons une belle histoire d’amour… à distance!» Le couple a quand même pu passer quelques jours de vacances "inoubliables" en Irlande...
Un autre épisode a aussi encouragé Helen à repartir en métropole,
le décès, en novembre dernier, de son oncle dont elle était très proche. «Par ailleurs mes parents sont en Normandie, je crois que c’est le moment pour moi de me rapprocher d’eux. Je laisse beaucoup d’amis à La Réunion, mais je reviendrai, j'ai encore des tatouages à réaliser pour quelques personnes…»
Helen Sea Ung va s’installer du côté du Mans avec Geoffrey qui entend devenir gendarme départemental -au lieu de mobile- afin d’éviter de partir régulièrement en mission. «En métropole, je me rapprocherai également du bouddhisme, et je militerai aussi aux côtés des associations asiatiques pour mieux défendre notre culture…»
Ce mercredi 18 mai, la belle Helen Sea Ung, 38 ans, s’envole donc vers une nouvelle vie professionnelle et personnelle après plus de 10 ans de Réunion, «une île que je n’oublierai jamais. Je suis arrivée ici fragile, je repars plus forte, et je compte bien grandir encore…» C'est tout le mal qu'on lui souhaite!
Aziz Patel
Photos DR (fournies par Helen)
Violée à l’âge de 21 ans, elle a porté plainte 15 ans après!
Helen Sea Ung a longtemps caché ce sombre épisode de sa vie de femme: elle a été violée par son ex-patron alors qu’elle était serveuse à Bordeaux. «Je suis tombée dans un guet-apens… A l’époque j’étais dans la honte, j’avais peur que l’on ne me croit pas, je n’ai rien dit. On pense qu’on a provoqué ça, qu’on est coupable et non victime. Je me sentais maudite, après un viol on vit avec un filtre, cela ne facilite pas les relations amoureuses, j’ai donc porté ma croix pendant de très longues années…»
C’est en juillet 2020, soit 15 ans près le viol, qu’Helen a décidé de porter plainte: «Une cliente m’a raconté son histoire qui faisait écho avec ce que j’avais vécu, j’ai donc décidé de porter plainte pour me libérer de ce poids. Le policier a été très à l’écoute, j’ai bénéficié d’une expertise psychologique, d’une psychothérapie, c’est très bénéfique d’être prise en charge. Je dis aux femmes qui ont subi un viol qu’il est possible de se relever d’un tel traumatisme, il faut porter plainte...»
Sa plainte lui a permis surtout de se libérer de cette "culpabilité cachée", car le violeur était hélas décédé depuis six mois quand Helen a décidé de déposer plainte, l’affaire a donc été classée.
Avec ses copines pour la Journée des Droits des Femmes en 2021: "On voulait mettre en avant la femme indépendante et résiliente". De gauche à droite: Erika, Jamie, Helen, Alice, Erika et Peggy