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Edito
Lundi 4 Mai 2020


De l’impuissance de la science et de la politique face au Covid-19





Une pandémie qui a fait découvrir le mot "confinement" au monde entier
Une pandémie qui a fait découvrir le mot "confinement" au monde entier
Tout est dit et tout sera encore dit sur ce coronavirus venu d’on ne sait où. Déjà, sur l’origine du Covid-19, personne n’est capable de nous exposer une doctrine fiable et définitive. Entre suppositions et hypothèses, les explications varient d’un jour à l’autre, les fantasmes prenant souvent le dessus sur une version un tant soit peu rationnelle. La science ne sait pas, et la politique tente de faire porter le chapeau par tel ou tel pays. On est plutôt mal barré.
 
Si, après plusieurs mois d’étude, la science est dans l’incapacité de nous délivrer une certitude sur les origines de ce virus, elle est encore plus dans l’expectative concernant la possibilité d’un traitement efficace contre le Covid-19, et tout autant perplexe quant à la découverte d’un éventuel vaccin. On nous dit tous les jours que les chercheurs y travaillent sans relâche, apparemment la compétence a des limites…

Les chercheurs cherchent mais ne trouvent toujours pas...
Les chercheurs cherchent mais ne trouvent toujours pas...
L’argent ne suffit pas…
 
Les Etats dépensent des milliards d’euros, les laboratoires disposent d’énormes moyens financiers, les pays dit développés ont formé des scientifiques de très haut niveau, mais l’argent et la compétence actuelle ne suffisent pas tant il est vrai que ce virus dernière génération, qui plus est mutant, est particulièrement difficile à cerner, donc à contrer. Dans les écrits les plus alarmistes de science-fiction, personne n’a jamais pu imaginer une telle déroute de notre civilisation, soi-disant avant-gardiste.   
 
Les laboratoires du monde entier se battent entre eux afin d’être le premier à trouver d’abord le remède et ensuite le vaccin. On nous parle de coopération entre les meilleurs scientifiques du monde, mais la volonté d’être celui ou celle qui trouvera le graal est manifestement plus forte que la nécessité de coopérer de manière sincère, les grands discours officiels étant clamés sous le sceau de l’hypocrisie. La communauté scientifique est un monde impitoyable…
 
Le désormais célèbre professeur Didier Raoult persiste et signe sur l’efficacité de l'hydroxychloroquine, dommage qu’il ne respecte pas les règles scientifiques habituelles en la matière en omettant de mettre en place un groupe témoin comparatif, avec des patients ne bénéficiant pas de chloroquine. Sans compter le fait que des effets secondaires ont été constatés suite au traitement à la chloroquine.  

«Tous ceux qui se risquent à des prédictions sont des charlatans. Je suis un homme de savoir, pas un devin» dit le professeur Raoult. On veut bien vous croire professeur, moi le premier, mais pourquoi ne pas faire les choses selon le processus de validation scientifique? Cela aurait évité toute cette polémique non?
 
Malheureusement, il existe une méthodologie précise en matière de traitement et de vaccin, et faire différemment sous prétexte de l’urgence de la situation peut être à double tranchant. Après quelques mois de pandémie, force est de constater que la science demeure impuissante, et quand elle trouvera remède et vaccin, il sera déjà trop tard pour rattraper les dégâts incommensurables provoquées par ce foutu Covid-19. C’est grave docteur ?
 
«Dans cette crise, les scientifiques ont une grande difficulté: la temporalité de leurs travaux n’est pas celle du politique» a dit Thibaud Boncourt, maître de conférences en science politique à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne dans une interview. «Celui-ci doit prendre des décisions très importantes dans un délai très court alors que la preuve scientifique s’obtient au terme d’un processus nécessairement plus long, comme celui des essais cliniques».

Le monde restera contaminé, mais il ne changera pas hélas...
Le monde restera contaminé, mais il ne changera pas hélas...
Entre doutes et incertitudes…
 
Cette déclaration de Thibaud Boncourt traduit parfaitement le thème de cet édito. L’impuissance de la science transpire sur celle du politique. Les décisions prises par les gouvernements en général, et par le gouvernement français en particulier, sont teintées de doutes importants, et faisant souvent preuve d’incohérence et de d’irresponsabilité collectives. A la décharge des politiques malgré tout, quelles décisions efficaces prendre quand les scientifiques ne sont pas certains de leurs pronostics? On joue à pile ou face tout simplement…
 
L’exemple le plus frappant concerne la réouverture prochaine des écoles: comment surfer entre l’inquiétude des parents, enseignants, collectivités locales sur la nécessité de cette rentrée, à leurs yeux prématurée et dangereuse, et la fameuse justice républicaine sur l’enseignement? Le gouvernement français marche sur des œufs, en espérant qu’ils ne cassent pas dès les premières semaines de la rentrée. Pile ou face.
 
Contrairement à ce qui a pu se dire, le politique n’a pas abdiqué face à la science, mais pour une fois, le politique ne peut pas décider en faisant fi de la priorité absolue, la santé de la population. «La décision politique est d’une extraordinaire complexité dans ce genre de crises où l’incertitude scientifique est très forte» dit Roselyne Bachelot, ex-Ministre de la Santé, ce qui résume bien la situation.
 
En tout état de cause, je ne sais pas qui aimerait être à la place du président Emmanuel Macron et de son Premier Ministre Edouard Philippe, qui font face à un phénomène aussi imprévisible que meurtrier en tentant de prendre les décisions adéquates. Selon un sondage réalisé par le JDD, 20% seulement des Français estiment que Marine Le Pen ou Nicolas Sarkozy feraient mieux qu’Emmanuel Macron s’ils étaient au pouvoir, Jean-Luc Mélenchon récoltant 15% des suffrages, et Xavier Bertrand 13%.
 
Aucun gouvernement n’a été confronté à une pandémie de cette importance, générant une crise économique sans précédent. Le pire, c’est que chaque décision prise est aussitôt l’objet de critiques acerbes, l’union nationale étant définitivement une utopie. Certains nous parlent de manipulations occultes et d'oligarchie permissive qui auraient créé cette crise pour mieux en profiter, cela nous semble relever plus de la fiction, tant il est vrai que, déjà, riches, pauvres, Blancs, Noirs, politiques, soignants, sont tous touchés par cette maladie. 
 
L’impuissance de la science, cumulée à celle de la politique nous a au moins montré l’extrême fragilité de notre société que nous croyions à jamais supérieure et invincible… Restons toutefois lucide, et c'est bien dommage, le monde ne changera pas pour autant.
 
Aziz Patel  


Aziz Patel
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