Philippe-Alexandre Rebboah, présidet du SICR et directeur général de Leal Réunion (photo A.P.)
A La Réunion, le marché Véhicules Particuliers/Véhicules Utilitaires (VP/VU) a baissé de 23,47%, ce qui constitue une baisse d'environ 9% pour les deux premiers mois de l’année 2025. Pour les voitures électriques c'est la Bérézina: la baisse du marché électrique toutes marques, au cumul à fin février 2025, recule de presque 28% par rapport au cumul de fin février 2024. Enorme baisse!
On incite les consommateurs à acheter électrique, soi-disant pour faire des économies et lutter contre le réchauffement climatique, mais tout est fait désormais pour décourager les potentiels acheteurs, avec moins d'aides à l'achat, plus de taxes, des bornes de recharge insuffisantes, et une énergie qui coûte de plus en plus cher. Nous aurait-on trompé?
Par le passé il y a eu un bonus écologique important et une taxe à 0%. Le bonus diminue régulièrement et les taxes augmentent! Depuis le 1er mars, la Région Réunion a mis en place "un octroi de mer vert". Raison invoquée: "Il s'agit de répondre à des objectifs de développement durable". Ce qui fait que toutes les voitures dépassant les 150 chevaux seront lourdement taxées: 8% sur les modèles de moins de 250 chevaux, 14,5% pour les moins de 400 chevaux et 24,5% de taxes pour les modèles de plus de 400 chevaux.
Deux exemples:
- un véhicule électrique de 180 ch valant 50 000€ sera taxé de 8%, il faudra payer 4 000€ de plus
- un véhicule électrique de 420 ch valant 100 000€ sera taxé de 24,5%, il faudra débourser 24 500€ de plus.
Evidemment on pourrait dire que le client qui achète une voiture à 100 000 a des moyens et pourra toujours mettre 24 000 de plus, ce serait trop facile de stigmatiser, 24 000€ c'est de l'argent! Et la crise touche toutes les bourses, hormis celles des milliardaires...
En fait si on ne veut pas payer de taxes, il faut acheter des voitures de moins de 150 ch, mais là aussi tout pourrait encore changer à l'avenir si la Région constate une baisse des ventes des autos de plus de 150 ch.
"Si on voulait casser le virage de la transition écologique dans l'île, on ne pouvait pas faire mieux. La Région Réunion a décidé de cet octroi de mer vert sans aucune concertation avec les concessionnaires automobiles et nous le regrettons" dit Philippe-Alexandre Rebboah, président du SICR (Syndicat de l'Importation et du Commerce de La Réunion). et directeur général de Leal Réunion (BMW-MINI).
"Par exemple chez nous à Leal Réunion, nous commandons les voitures un an à l'avance, et si les règles changent en cours de route, c'est une catastrophe. Plusieurs groupes locaux vont avoir des problèmes avec ces nouvelles taxes".
Le secteur automobile est en crise depuis quelques années avec des ventes en baisse, Philippe-Alexandra Rebboah estime que "dans un tel contexte les ventes vont continuer à baisser. C'est le marché électrique porté par le segment Premium qui va être le plus impacté. Et ce sera d'abord moins d'argent pour la Région avec la baisse des ventes, et ensuite des licenciements potentiels dans les entreprises qui vont souffrir.
On veut des véhicules propres, hybrides, thermiques? Déjà la voiture électrique est plus chère à l'achat, et maintenant elle est taxée! Rien n'est clair car on a le sentiment qu'aujourd'hui c'est taxer pour taxer, plutôt que d'avoir une vraie stratégie sur le territoire" regrette le président du SICR.
Les voitures électriques de plus de 150 chevaux sont désormais taxées, et lourdement pour les plus puissantes
Fin des thermiques en 2035? Marche arrière toute!
Depuis quelques années, on nous a prévenu qu'à partir de 2035, les constructeurs européens ne pourront plus fabriquer de véhicules thermiques. L'électrique et rien que l'électrique pour réduire le taux de CO2 et lutter contre le réchauffement climatique. Un leurre? Une utopie? Surtout que sur tous les autres continents du monde, avec des pays considérés comme les plus pollueurs du monde, les voitures thermiques seront toujours d'actualité. On pourrait certainement trouver aussi d'autres solutions pour lutter contre le réchauffement climatique plutôt que tirer à boulets rouges sur les voitures.
La fin du moteur thermique en 2035 est-elle toujours d'actualité? Récemment, la Commission européenne a déjà assoupli les conditions du protocole CAFE (Corporate Average Fuel Economy). "En effet, afin de compenser les émissions de gaz à effet de serre du parc de voitures thermiques, il faut que les constructeurs vendent des électriques sous peine d’amendes qui devaient intervenir dès cette année", expliquait le site GNT.
La commission a donc accordé que les émissions de CO2 soient calculées sur trois ans (de 2025 à 2027) au lieu d’une année. L'ancien ministre Luc Chatel, qui est le patron de la puissante Plateforme de l'Automobile (PFA), l'a dit: "Il va falloir enfin qu'on réalise les études d'impact qu'on aurait dû réaliser au moment de la décision sur l'interdiction des moteurs thermiques". On reconnaît donc aujourd'hui que cette décision a été prise trop vite apparemment. Il a aussi dit qu'il était nécessaire "que tout le monde se remette autour de la table pour trouver des solutions et discuter de l'ensemble des technologies". Enfin une parole sage!
L'autre débat reste bien sûr celui de la date de 2035. Pour rappel, il y a quelques semaines, l’Assemblée nationale a rejeté l'article 9 du projet de loi «Industrie verte» et donc refusé de valider la date de 2035, préférant le cap fixé à 2040, selon notre confrère Capital. Marche arrière enclenchée!
Parmi les politiques une voix s'est aussi élevée contre le Green Deal: Jordan Bardella, président du Rassemblement national, a demandé la "suspension immédiate" du Green Deal européen, visant la neutralité carbone d'ici 2050. ce Green Deal étant "un frein à la croissance avec des contraintes réglementaires sur l'économie européenne". "Le Pacte vert, par son inflation normative et ses multiples contraintes, condamnera des secteurs clés comme l’agriculture, l’industrie automobile, l’intelligence artificielle ou encore l’énergie", a-t-il dit, craignant que ces mesures risquent d’isoler l’Europe sur la scène mondiale.
Alors que les industries automobiles ont investi des milliards pour construire des usines ou des chaînes de fabrication de voiture électriques, on ne peut que constater que l’objectif de 100% de voitures électriques en 2035 semble illusoire et très difficile à tenir. Affaire à suivre comme on dit, mais en attendant les ventes de voitures électriques vont encore baisser. Quel gâchis!
Aziz Patel
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